vendredi 5 avril 2019

Apéros dehors


APEROS DEHORS

Comment en est-on arrivé là ?
Comment en est-on arrivé à ne plus se parler, ne plus se sourire, ne plus rigoler... sans l'ombre des sujets qui fâchent, à éviter ? Comment peut-on être si distants les uns des autres, tout en sauvant les apparences ?
Chacun chez soi, chacun pour soi. Nous souffrons beaucoup de cela.

Alors je vais être très claire : je ne veux plus de ce système oligarchique, confiscatoire, qui aboutit à nier la plupart des gens (sans même parler des autres espèces et éléments).
Nul besoin là d'expliciter, les deux liens ci-dessous donnent déjà matière à comprendre (et il y a les milliers d'autres informations auxquelles on a accès par soi-même, en ayant recours à son propre discernement. Pas la soupe prémachée servie sur un plateau).

Partant de ce refus net, comment créer autre chose pour vivre ensemble ?
Il est aussi clair que je n'en sais rien. Mais des éléments de début de quelque chose me viennent aujourd'hui.

Je partage d'abord cet entretien pour Ballast avec le philosophe Jean-Paul Jouary qui me semble poser la question politique ici et maintenant de façon limpide : https://www.revue-ballast.fr/jean-paul-jouary-de-tout-temps-les-democrates-ont-refuse-le-suffrage-universel/.

- Après la confiscation (du pouvoir, et la captation des communs),
- après la séparation des uns et des autres,
- après la disqualification de toute opposition à ce système (avec une série de mots en -isme),
- après - aujourd'hui c'est visible comme un coquelicot échappé dans un champ de blé - la répression de toute forme de contestation ou mouvement social ("quartiers populaires", sans-papiers et solidaires, supporters de foot, "zadistes", militants tout court, militants écologistes, altermondialistes, lanceurs d'alerte, gilets jaunes... - et maintenant les street medics, les reporters...),
- après, en somme, la destruction massive du politique chez les gens, tout en pouvant se revendiquer dans le monde officiel comme "démocratie", "état de droit",
on en vient à reposer les bases.

Je cite J-P Jouary :
"La construction de réflexions et de décisions collectives par la parole est non seulement le cœur du politique, mais c’est la construction même du peuple citoyen, le passage d’une somme d’individus à un ensemble plus cohérents de citoyens."

Un premier élément de réponse pour passer du je au nous : se parler, échanger des paroles.

Un autre élément de réponse, François Ruffin nous le pose comme ça, au détour d'une rencontre filmée à Strasbourg (je ne soutiens aucun parti politique, je n'ai pas de mentor, mais je suis attentive à l'humanité quand elle s'expose sans voile) : https://www.facebook.com/FrancoisRuffin80/videos/1926753194096968/.



Tous les témoignages de ce moment disent une vérité à laquelle être attentif, mais si on veut faire court, à partir de 15'20 (ça vaut le coup à écouter-voir) :

"Il y a une autre chose qui gargouille dans les ventres. (...)
"Les coups de matraques sont donnés à tous les gens pour leur dire : ne sortez pas de chez vous. (...)
(22'10)
"Je ne pense pas qu'il y ait la nécessité forcément d'une convergence. Mais par contre je pense qu'on peut être synchrones, sans qu'il y ait forcément de convergence.
(...)
"Il y a un moment à jouer. (...)
(24'20)
(Citant un proche du président, dans le Parisien :) ""Je ne vois pas comment on sort de ça. Avec les beaux jours, les GJ vont revenir et installer des barbecues sur les ronds-points." Voilà le chemin ! Le chemin nous est donné par le Parisien (...), il suffit de faire des apéros FB sur les ronds-points du pays, y a pas plus fédérateur, et je pense que comme ça, en effet, ce printemps on peut mettre une énergie nouvelle." - "Barbecues vegan !" (on entend dans les personnes présentes) - "Aubergines grillées !" - "Même avec les barbecues on est divisés du coup" (:D :D :D...)
(...)
"Il y a pas 36 solutions les copains (...), l'énergie elle va pas rester dans la salle de cinéma ce printemps, elle doit sortir."

C'est ça : sortir, faire des apéros, se parler, rire, pleurer, reprendre contact, la vie... Pas une fausse image, bien sous tout rapport, on se croise, et on n'établit plus de vraie relation - c'est en train de nous tuer.

Rompre l'isolement. Oui se rencontrer, oui se parler, oui prendre l'apéro. Pas chacun chez soi, pas dans son cercle restreint. Dehors, là où il y a déjà du monde. Là où il y a déjà des gens qui se parlent. Même si on n'a pas les mêmes points de vue, même si on n'a pas les mêmes "cheval de bataille", ou qu'on n'en a pas tout simplement, même si on n'a pas les mêmes conditions de vie... Recommencer à se parler.
A se voir déjà, se sourire éventuellement, échanger quelques regards, même si on ne dit rien et qu'il y en a qui gueulent. Qui disent des conneries. J'en dis aussi, même qu'à moi. Reprendre juste contact. Se re-connaître. Ne pas chercher à convaincre, à mettre en avant sa vision, ne pas savoir, redécouvrir. 
Nous sommes tous ignorants.
Pas de ralliement, mais commencer à se relier, juste comme ça en prenant contact en vrai. Les corps dehors.
Oui je vais sortir prendre l'apéro. Je vais aller là où il y a déjà des gens qui se parlent et qui se sont rendus visibles parce qu'ils n'étaient rien.

En étant nombreux, différents, dehors, visibles, à commencer à se parler, à commencer à s'écouter, à se découvrir, sans chercher l'accord, l'approbation, le similaire, le mariage et la construction de la maison, sans déballer des solutions déjà prêtes à l'emploi, quelque chose de nouveau se fait...

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