jeudi 28 février 2019


(Alerte clip magnifique)




J’aimerai être vivant
Et ne plus avoir peur
J’aimerai aimer mon père
J’aimerai savoir quoi faire
J'aimerai bien le comprendre
J’aimerai bien qu’il attende
J’aimerai être important
J'aimerai être un désir
J’aimerai être impossible
J’aimerai te voir guérir
J'aimerai te voir grandir
Atténuer tes douleurs

Tombera les croix
Mon rêve réussira
Tomberont les diables
Les dieux n’existent pas

Attaque mes rêves
Ou détruis mon âme
On sera un rêve incroyable
C’est juste ma vie
C'est juste mon âme
On sera un rêve idéal
On aura une vie incroyable
Je voudrai un rêve idéal

J’aimerai être un guerrier
Quelqu’un d’effrayant
J’aimerai que tu reviennes
J’aimerai me sentir bien
Accueillir des réfugiés
Revenir en arrière
J’aimerai ne plus vieillir
Et y avoir jamais cru
J’aimerai juste essayer

Tombera les croix
Mon rêve réussira
Tombera le diable
Les dieux n’existent pas

Attaque les rêves
Ou détruis les âmes
On sera un rêve incroyable
C’est juste ma vie
C'est juste mon âme

On sera un rêve idéal
Tu seras un rêve idéal

On m’avait dit
Que toutes mes peurs
Disparaîtraient
Et moi la nuit
Je rêvais d’une vie incroyable

Et moi la nuit
Je voudrai un rêve idéal
Et moi j’oublie
Que demain nos réalités

J’aimerai être vivant
Être quelqu’un
De bien meilleur
J’aimerai aimer mon père
J’aimerai savoir
Comment faire
J’aimerai te voir grandir
J’aimerai ne plus
Te voir souffrir
J’aimerai revenir en arrière
Où rien n'était important

mercredi 27 février 2019

Fais tomber tes dents




Fais tomber tes dents
Laisse-les partir, crache-les, ne les ramasse pas
Petites paillettes de chemin

Les mites et la rouille
L'ivoire, l'or, le plomb ont la même valeur
L'os et la poussière

Fais tes mots
Mange ta soupe
Vie - sans - vie - sans - vie - sans - vie

Regarde ce qui se passe dans le buisson
Ca arrive

Peux-tu voir une fleur prête à s'ouvrir ?

lundi 25 février 2019

Nous



"Nous ne défendons pas la nature. 
Nous sommes la nature qui se défend."




mercredi 20 février 2019

Demos



Super explications de Dimitri Courant du début à la fin, sur la question de la démocratie réelle et la question constituante, celle de la structure.

"Ne haïssez pas les joueurs, haïssez le jeu. Changez les règles du jeu."

"A l'heure actuelle en France, c'est possible d'avoir une personne qui est élue avec 80% d'abstention, par exemple, 10% de votes blancs et puis... 30 candidats. Une personne est élue avec une majorité très faible. Cette personne est élue sur un programme et peut faire exactement l'inverse le lendemain de l'élection. C'est possible. Ca, c'est la situation en France à l'heure actuelle. On me dira : ça n'arrivera pas... Il n'y a rien qui ne l'empêche dans notre constitution. C'est la porte ouverte à toutes les dérives."

"Il y a plein de questions. Mais en se posant ces questions-là, on ouvre à nouveau des possibles : on peut se poser ces questions. C'est plus "there is no alternative", "de toute façon, vous ne pouvez rien, etc." Si jamais je veux changer mon pays et ma constitution, qu'est-ce que je veux ? Qu'est-ce qui est bien ? Cette prise de conscience qu'on peut changer notre système politique et qu'on n'est pas condamné à rester dans la Ve République, et Dieu merci, c'est formidable car c'était très déprimant."

Il aborde des processus qui se sont déroulés aux Pays-Bas, au Canada (en Ontario et Colombie Britannique), en Islande, en Irlande, et quelques éléments sur la façon dont cela fonctionne en Suisse.
Il revient sur les notions de monarchie, aristocratie et démocratie, puis un bref rappel historique sur l'avènement de ce qu'on appelle rhétoriquement "démocratie représentative".
Puis la France, qui a un scrutin uninominal à 2 tours, un calendrier législatif particulier, sans "midterm", sans "recall", sans "consensus"... et dans laquelle la majorité avance et l'opposition hurle, sans pouvoir faire grand' chose, où il y a 3% de gens encartés parmi lesquelles quelques personnes constituent l'offre politique, et où on brûle des voitures...
Quelques observations aussi sur Nuit Debout, Occupy, les Indignés, les Gilets Jaunes.
Il clarifie brièvement la notion de "populisme" et ce qu'il y a derrière....
Et évidemment l'outil du RIC, qui tout seul ne suffit pas, le diable étant dans les détails...
Beaucoup, beaucoup de choses...




mardi 5 février 2019

Utiliser le mot Permaculture ? (suite)


Lien de la première partie de l'article, qui permet de comprendre ce qui est écrit ci-dessous : https://supercabane.blogspot.com/2019/02/utiliser-le-mot-permaculture.html.





Je m'aperçois que j'ai négligé de mentionner clairement l'élément relationnel, social, de groupe... dans ce thème (merci Christophe !). 
Effectivement, si tout part de l'intérieur - sans quoi le monde n'existerait pas pour moi, pour vous -, nous sommes en relation. Dans le monde, nous sommes apparemment séparés et en même temps nous n'existons pas tout seul. Nous sommes même en relation avec la "microfaune" de "notre corps" qui "protège notre intégrité physique" (jusqu'à un certain point !).
Les relations humaines sont bien au coeur de ce thème. Les mots évoqués sont effectivement des mots derrière lesquels des êtres humains se regroupent, parce qu'on les créé pour traduire une façon d'organiser, de penser la vie ensemble justement. Notons qu'aujourd'hui la pensée de la vie ensemble n'intègre plus seulement les êtres humains, mais tous les éléments de la nature dont ils font partie car on se prend de plein fouet la réalité de l'interdépendance de tous ces éléments, humains compris (tiens, c'est étonnant, certains regroupements d'êtres humains sur la planète ont intégré cela depuis longtemps, sans recours à "nos" connaissances scientifiques, et sans la provocation de catastrophes écologiques).
Donc on crée des nouveaux mots du fait de cette réalité "nouvellement comprise" pour nommer de nouvelles façon d'aménager le fait qu'on n'est pas tout seul, qu'on a "besoin les uns des autres". 

Si on est en train d'intégrer la dimension non humaine dans le relationnel et dans l'organisation de la vie ensemble, nous n'avons toujours pas réglé nos problèmes relationnels entre êtres humains ! On est encore à la recherche de mots, de pensées, d'aménagements, à adopter, qui vont les régler. Dites, on ne serait pas toujours embourbé dans le même problème ?! 
Et il y a fort à parier que si l'être humain "résout" son problème relationnel avec ses semblables, il résoudra par là-même son problème relationnel global avec "le vivant" car c'est en fait le même état dysfonctionnel qui fait que l'on ne voit pas le vivant dans son semblable, et qu'on ne le voit pas dans tous les éléments de ce monde, non humains compris.

Or visiblement, parce qu'on commence à avoir un peu d'expérience en la matière, ça ne passe pas par une solution miracle à plaquer à une situation.

D'abord, qu'est-il alors ce "besoin les uns des autres" entre êtres humains mentionné plus haut ? Qu'est-ce que vous, vous, mettez derrière cette expression ? Questionnez-la pour vous-même réellement.
Je vais donner temporairement ici une forme de réponse "historique", plus globale (et très partielle !) :
Est-ce le besoin que les autres se conforment ?
Car souvent, dans les faits, ça s'est traduit par : 
Toi et moi, on marche ensemble pour s'en sortir. Mais il nous faut un contrat commun. Sinon j'ai trop peur que tu me fasses une entourloupe et que je ne m'en sorte pas. Il nous faut une entente, ok, mais comme j'ai peur que ce ne soit pas respecté, il faut que cette entente ait un règlement qui me donne le droit de te tuer - bon de t'emprisonner, si tu ne le respectes pas ("Comble-moi, rends-moi heureux et ne t'avise pas de me quitter, ok ?"). 
Puis, au final, comme nous sommes plus intelligents que les autres hein, ce règlement, nous en faisons une bannière que le monde entier devrait adopter. Il faut que l'autre "soit" comme on a envie qu'il "soit", qu'il se conforme. 
C'est absurde, on se rend malheureux depuis des temps immémoriaux avec ça.
On a l'impression de créer des super idées pour vivre ensemble : enfin, on a la solution pour pouvoir durer dans ce monde ! Vite, il faut que tout le monde sache ça et on est perdu si on n'applique pas les choses de cette façon !
Sauf que ce monde est impermanent, imparfait, conditionné, que nous ne sommes pas omniscients, etc. Donc on se trompe forcément quelque part.

Alors, de fait, on vit quand-même ensemble... Comment fait-on pour ça ?

C'est de là qu'on en vient à exprimer préalablement que si on est clair à l'intérieur, on est clair à l'extérieur. C'est la "première" étape (si on doit séquencer). Or, depuis que l'on "se" pense "soi-même", à l'échelle de l'évolution humaine, on n'est pas clair à l'intérieur et on le fait se manifester à l'extérieur.
On étend notre façon d'être au monde.
Qu'est-ce qu'on fait ? On se remplit de trucs, d'idées, d'objets, de pensées, en fonction de son propre contenu de vie, de son histoire, de son contexte, des émotions vécues et accumulées, etc.
Et puis, avec ce contenu et à partir de lui, on va dire que telle ou telle chose est mieux qu'une autre, on évalue, on fait des classifications... Et on se positionne, et on s'identifie, et on incarne des rôles, etc.
On crée un faux sens de soi. Et comme ce faux sens de soi est très fragile car il ne repose sur rien de solide, sur rien d'absolu (on pourrait même dire sur un foutoir bringuebalant), il se sent toujours menacé. Il faut toujours "se" défendre, "se" justifier ; et parallèlement, il faut chercher à "s"'étendre pour "se" renforcer en convainquant les autres, en acquérant de nouvelles choses, etc. 
Et, ultimement, il faut créer un truc absolu auquel tout le monde doit se conformer comme ça c'est plus simple ("Dieu" ?, les "Droits de l'Homme" ?, la "Permaculture" ?... - pour reprendre les mots évoqués dans le précédent article).

Si ça ce n'est pas nous, alors qui sommes-nous ? C'est justement la question qu'il y a à se poser... Et il n'y a pas de réponse arrêtée... C'est bien cela que l'on n'accepte pas. Ne pas pouvoir se définir. On passe ainsi son temps à combler un manque, en ajoutant des trucs.
Peut-on s'arrêter 2 secondes, et regarder ce "vide" ?
C'est justement en sentant, en voyant cet "espace" en soi, derrière les sens et le mental, que l'on vient au plus près de la "vie" indéfinissable, illimitée. 
Comme dit au début du post précédent, avec les mots, on ne peut pas traduire l'indicible. C'est la pensée humaine, la pensée n'est pas ce qu'on est. On est autre chose derrière ça. Il y a une autre dimension en nous qui englobe les pensées, les émotions, les sensations, les expériences, et qui les voit telles qu'elles sont.
Tant qu'on a peur, qu'on n'est pas à l'aise avec ce "vide", on se prive d'expérimenter le fait de prendre conscience des étiquettes que l'on colle partout, d'aller dans cet espace intérieur où on voit les choses de façon non conditionnée. Tout le monde "a" ça, tout le monde "est" ça. 
Au-delà des rôles que l'on joue, qui peuvent être celui de la personne infâme, ou celui de la personne infime, timide, inoffensive, qui a peur d'être moins bien et nourrit secrètement l'envie d'être supérieure... 
Cela suppose de partir de là où on est, dans le moment, en revenant toujours ici, dès qu'on est embarqué dans des projections, dans un vouloir qui n'est pas là, ou autre chose...

"Ensuite" (si on continue à séquencer), on fait le lien entre cet espace intérieur et l'incarnation dans le monde.
Et c'est là qu'on voit déjà que la plupart de nos relations sont faussées car on joue des rôles conditionnés, etc. Imaginez des "faux sens de soi" qui parlent entre eux ce que ça donne ! Et qui pensent dire des choses très intelligentes.
Donc on revient toujours au moment qui n'existe que maintenant, par cet espace de conscience, qui n'est pas dans la tête, qui n'est pas le raisonnement mental, mais qui est aussi sentir son corps, voir ses émotions, ses pensées, ses sensations. Les accepter sans les laisser nous embarquer dans une histoire qui nous ferait dire par exemple : je suis malheureux parce qu'on m'a attaqué, donc j'attaque, j'ai le droit du coup, etc. Le "malheur" est "mon histoire malheureuse", une fiction que j'entretiens. Ce qui est réel cela peut-être des faits réels, un coup que l'on a pris, un inconfort, une douleur, de la souffrance, une émotion lourde qui fait mal dans la poitrine... Ce sont des émotions, des choses, des pensées, que l'on entretient si on les grave dans le marbre. Or, on est capable de transmuter cela, d'aller au-delà de ce qui n'est pas soi.
Ce n'est pas du contrôle mental, un truc qu'on se met dans la tête dans le but de devenir "parfait", ni du stress... C'est une sorte de vigilance calme de l'instant. Mais paradoxalement ce qui peut aider c'est de laisser aller, ne pas se préoccuper de ce qui se passe, et revenir à la sensation de vie à l'intérieur du corps, qui n'est pas une sensation par les sens pourrait-on dire, c'est au-delà, cela ramène à la "conscience" (je peux mettre un autre mot qui me permet d'appréhender cette réalité).
De là, on revient au monde et à la situation qui est en train de se dérouler, et on peut éventuellement poser un geste à partir de cet espace d'intelligence. C'est simplement à expérimenter.

Tout ceci n'est pas un repli sur soi, et ne nous empêche pas d'élaborer des moyens de s'organiser à plusieurs. Nous partons alors de l"'intelligence" telle qu'elle est décrite plus haut, et nous ne partons pas d'un concept que nous essayons de coller à une situation, concept qu'on nous a peut-être vendu, puis que nous essayons de revendre à notre tour, avec tout ce qu'on y a mis de "soi", qu'il faudra donc faire attention à défendre, etc.
Et nous pouvons prendre du plaisir à être ensemble et à créer. Parce qu'il n'est question que de ça. Il n'y a rien de figé dans le monde, c'est une vue de l'esprit, l'univers est un processus constant. Donc nous sommes tout le temps en train de créer. Et si nous voyons clairement tout ce qui nous gêne pour ça, ce qui fige, ce qui fascine de façon "morbide", les mots, les pensées qui viennent nous prendre toute notre attention, en disant : " Coucou ! Regarde comme je suis importante !", eh bien qui sait ce que nous ferons ? 
Sans mettre une pensée là-dessus, car cela n'existe pas ce que l'on fera, et il est vain d'essayer de faire de la suggestion pour quelque chose qui n'est pas là, mais on sait déjà en expérimentant que cela permet de commencer à sortir des vieux schémas réactionnels conditionnés que l'on se traîne. Et déjà, rien que de les voir, même s'ils sont encore très souvent là, c'est un pas très important par rapport à l'état d'"inconscience" qui prime depuis des années et des années.

Ce qui est important c'est la façon de se comporter vis-à-vis de la pensée, plutôt que la pensée en elle-même. La pensée est outil, or on fait de cet outil une fin en soi et on s'en sert "mal". Et ce qui se passe c'est que les "personnes vivantes", on s'en sert comme des outils, à jeter éventuellement s'ils ne sont pas conformes à ce qu'on voudrait. On ne voit plus le vivant, on préfère même parfois le mot à la personne - c'est l'abominable aberration. 
Elle est pratiquée bien sûr en masse à l'échelle collective, de façon encore plus désincarnée, mais aussi à l'échelle individuelle, dans "nos petites vies" - peut-on le voir ?

Ce n'est pas écrit à l'avance ce qu'on fera ensemble. Simplement, on ne peut pas partir d'une idée, qui n'existe qu'en pensée, en se disant qu'on fera le bien avec cette idée. "La route vers l'enfer est pavée de bonnes intentions", dit-on. C'est ce qu'on a toujours fait, et on a le monde qu'on a.
Partons de l'intérieur, clarifions, voyons-nous nous-mêmes et allons dans le monde vers les autres et voyons ce que l'on est en train de faire ensemble. Chaque moment est tout petit. La grandeur des évènements est une vue de l'esprit. Soyons à chaque moment vigilants, attentifs au signe qui nous invite à nous reposer : 
qui suis-je ?         - vide -
Ceci n'est pas une nouvelle croyance à adopter, est-on simplement prêt à l'expérimenter ?

Effectivement, derrière le mot permaculture, il y a des expériences réelles de partage, de création de communauté pour s'organiser et vivre, qui se questionnent. 
Ce, d'une façon beaucoup plus horizontale entre les personnes, et autonome, que ce qu'on peut connaître dans un schéma d'Etat classique qui perçoit l'impôt et pourvoit aux "besoins" (aujourd'hui plutôt assimilés à la consommation, l'administré étant rendu passif par la politique menée et vu comme un consommateur et un individu isolé). 
Cela concerne le politique, au sens de l'organisation de la vie de la cité.
S'intéresser au concept de permaculture, cela peut donc être une rupture, une remise en question (par rapport à la condition de consommateur et d'individu isolé), si nous portons réellement notre attention sur des questions comme : qui sommes-nous dans ce monde (par rapport à la "nature" qui n'est en fait pas distincte) ?, quels sont nos besoins réels ?, quelle responsabilité prenons-nous par rapport à ceux-ci et par rapport à notre impact dans le monde ?, comment envisageons-nous la communauté, les relations, les "autres" ?... (avec toujours présent à l'esprit : qu'est-ce qui m'anime à l'intérieur au moment où je me pose cette question ? ou au moment où je pose un geste ?).



Camille





vendredi 1 février 2019

Utiliser le mot Permaculture ?


Il y a des phases d'expansion, il y a des phases de retour. Comme dans la respiration, comme dans l'expansion de la forme physique et son retour... L'hiver est un moment propice au retour, à la concentration de l'énergie à l'intérieur. Je pourrais concrètement hiberner l'hiver. Avant de reparler des activités associatives en cours et projetées, une petite plongée maintenant dans ce qui peut émerger de l'espace du non agir.


Certains mots, expressions, concepts ont une histoire assez semblable, plus ou moins longue. Ils sont créés dans un contexte pour traduire une pensée spécifique, souvent nouvelle dans l'esprit humain à ce moment-là, et puis peu à peu le mot en lui-même devient si important, si fascinant, qu'il est utilisé comme s'il se suffisait à lui-même. On prononce le mot magique, et l'on pense que c'est une réalité à part entière. Certains mots en viennent même à asseoir d'autres fins, éloignées de la réalité que l'on prétendait indiquer à travers lui. C'est la bizarrerie de notre monde.

Les mots ne sont pas la réalité (et même la réalité est un mot !). Ils introduisent toujours une forme de dualité propre au mécanisme humain de la pensée.
En fait, les mots sont eux-mêmes des pensées, ce sont des outils pour nous. Les outils sont formidables pour les êtres humains et le monde, dont nous sommes partie intégrante. Ils ne sont pas un problème. Ce qui importe c'est l'usage que l'on en fait. Le monde que l'on créé dépend toujours de comment on utilise l'outil, qui ne se suffit pas lui-même, aussi formidable soit-il.

Avec le mot Permaculture, en France, ça a été assez fulgurant. Il a mis près de 40 ans à être importé, avec ce qu'il recouvre, et en quelques brèves années, il est aujourd'hui très souvent vidé de son sens : c'est-à-dire qu'il est fréquemment brandi, sans même vraiment savoir à quoi on fait allusion en l'utilisant.

Je n'emploie plus le mot permaculture, sauf pour des raisons pratiques, pour me faire comprendre ou désigner directement le concept. Ce n'est pas une nouvelle posture dogmatique qui viendrait remplacer la précédente, le mot n'est simplement pas important en lui-même. Utiliser une étiquette, si on n'a pas conscience que c'en est une au moment où on l'utilise, crée de la confusion dans l'esprit, et on finit par s'identifier à quelque chose qui n'est pas réel et qui vient alimenter un faux sens de soi. S'ensuivent des schémas habituels qui fonctionnent sur l'antagonisme, bien rodés chez notre espèce.

Ce concept élaboré par Bill Mollison et David Holmgren en Australie, à la fin des années 70, issu pourrait-on dire d'une forme de pensée humaniste qui intègrerait les relations horizontales entre êtres humains, et la relation êtres humains - nature, désigne une réflexion, une méthode pour concevoir, de façon très pratique et concrète, des systèmes humains respectueux de l'éthique suivante : "prendre soin de la Terre ; prendre soin des êtres humains ; produire des choses essentielles à nos besoins et en partager les surplus".
Ce, afin que les façons de faire humaines soient "permanent", c'est-à-dire qui autorisent l'idée, l'espoir, que nous puissions encore un jour habiter sur cette planète sans tout détruire avec nos procédés.
C'est parti d'une application de cette pensée-méthode au domaine particulièrement destructeur de l'agriculture telle qu'elle était pratiquée à l'époque et encore aujourd'hui, pour rapidement s'étendre à plein d'autres domaines qui recouvriraient en fait nos besoins (habitat, énergie, santé...), sous le vocable devenu "culture".
Cela veut montrer que c'est très possible de mettre en oeuvre des conceptions qui ne nous abîment pas (le nous étant inclus dans la nature), avec des solutions concrètement réalisables.
De là, c'est un peu "open source", avec toute technique, outil, bienvenu qui répondrait aux principes et à l'éthique proposés.

Souvent, quand une idée est "bonne", on s'engouffre dedans massivement comme d'un seul homme. L'Homme est toujours à la recherche d'un nouveau Dieu, créé par lui. 

Il ne s'agit pas de nier la réalité impulsée par ce mot, qui s'accompagne d'une pensée et de travaux très inspirants, et qui se traduit par plein de nouvelles activités en France et partout dans le monde, qui pour une large part ne sont pas du tout de l'esbroufe, mais bien des façons de faire, de vivre sur la planète qui se questionnent, s'expérimentent. Des connaissances et techniques utiles se transmettent, nouvelles ou oubliées - ceci n'est pas nié, et c'est enthousiasmant !

Mais, faire du mot permaculture un étendard, comme si c'était le bien incarné (en exagérant légèrement, pardon), c'est reposer éternellement le même état dysfonctionnel humain.

Ou alors quand on dit "faire de la permaculture", cela ne veut en soi rien dire. Cela peut sous-entendre faire le bien pour la planète ?, ou faire du jardinage en laissant pousser des herbes folles ?..., ou autre chose.
Ce qui a du sens c'est la réalité du moment qu'on appréhende consciemment. On est en train de discuter avec des gens pendant qu'on met les mains dans la terre et qu'on observe la microfaune, par exemple, ou, on est en train de dessiner à plusieurs une image d'un rêve que l'on essaie de traduire, ou...

Il n'y a aucun mot à défendre. Il n'y a pas plus de mot à attaquer. Les mots ont un usage pratique, on peut en trouver certains beaux aussi. Ils sont des obstacles quand nous y investissons quelque chose (une identification, une position mentale...) qui nous empêche d'expérimenter directement la réalité qu'ils seraient censés désigner. On se fait croire des choses, on se raconte des histoires. Demandons-nous toujours quelle réalité les mots que nous utilisons recouvrent, ne nous laissons pas endormir par notre propre berceuse. Les mots ne sont pas très précis, ce ne sont au mieux que des panneaux indicateurs, mais dès qu'ils prennent un côté sanctuarisé, c'est un signe qu'il y a là quelque chose de surinvesti. Et nous nous éloignons alors de l'intelligence lucide du moment, qui nous fait voir la réalité telle qu'elle est.

On a fait la même chose avec le mot "Dieu", avec l'expression "Droits de l'Homme", et des tas d'autres. J'ai côtoyé des gens qui consacrent de nombreuses années, voire "toute leur vie", au combat pour faire avancer les droits humains, et dès qu'ils se retrouvent dans des rapports réels d'humain à humain se comportent comme si ce qu'ils mettent derrière cette expression n'existe en fait pas, ou ne les concerne pas,  en massacrant ne serait-ce que symboliquement par une phrase, un regard, un jugement, par exemple, la personne qu'ils ont en face d'eux. Quand on fait cela ce n'est pas anodin (même si à ce moment-là on ne s'est pas servi d'un kalashnikov), car à ce moment-là on ne voit plus le vivant en l'autre, et c'est le principal dysfonctionnement humain. Par contre, on peut continuer à se raconter qu'on a gagné tel combat et se barder de l'étiquette du "bien". Avec les activités dans le domaine de la permaculture, ou de l'agroécologie, ou autre, c'est plus soft, on ne convoque pas forcément l'idée du "combat", mais on peut tomber dans le même piège de se penser "supérieur", "plus conscient", "plus malin", mieux quoi. Et cela n'empêche pas de vouloir sincèrement "faire bien pour la planète". C'est simplement une vue de l'esprit. On peut par exemple diffuser de l'information, partager des choses, sans se positionner mentalement de la façon décrite.

Parce qu'on aura beau s'agiter dans tous les sens et faire ce que l'on veut, élaborer n'importe quelle "stratégie", avoir l'analyse la plus intéressante possible, on est perdu si l'on ne regarde pas avec lucidité à l'intérieur de soi-même. Par quoi est-on animé dans le moment ? La racine est là. A-t-on suffisamment de discernement dans le moment pour examiner l'ensemble de la situation ? Nous ne sommes pas omniscients dans ce monde, nous sommes même très limités, malgré nos réelles prouesses techniques. L'illusion est de chercher à tirer notre discernement de l'extérieur. Ce n'est pas quelque chose qu'on va obtenir, par des concepts par exemple. Les choses du monde sont instables et impermanentes. Par contre, c'est en allant dans l'espace de sa conscience, que l'on a tous à l'intérieur de soi, qui est illimitée, que l'on peut, par exemple, distinguer un fait d'une opinion, voir les pensées (+ les émotions, + les sensations) comme telles, voir que l'on est en train de créer de la souffrance ou pas, voir l'illusion que peut procurer une "étiquette", utiliser une "bonne idée", un outil, sans l'investir d'un sens de soi...

Il n'y a pas de recette qui permettrait de se passer de l'intelligence appropriée à chaque situation. L'intelligence ce n'est pas celle qui se cantonnerait à l'intelligence de la tête et des raisonnements alambiqués, le mental est encore un outil. C'est voir, entendre, sentir, ressentir... au-delà des sens, qui sont le premier vecteur (du monde extérieur), et en-dehors des identifications, étiquettes, positions mentales (qui jaillissent à l'intérieur).

C'est cet état intérieur qui prime, et c'est de là que découle tout le faire qui n'est que secondaire. Souhaite-t-on la "permanence" du monde ? En réalité, l'idée de permanence traduit un réflexe sécuritaire, une résistance au changement. L'idée de durabilité aussi. Or, le monde, l'univers est un processus, sans cesse soumis au changement. Ce que l'on cherche c'est à y vivre harmonieusement en épousant la vague de la vie et en évitant d'ajouter de la souffrance inutile à l'héritage existant de souffrance.
Nous n'avons pas besoin de nous barder de concepts, mais juste à regarder en nous, et éventuellement après, faire quelque chose qui part de cet élan (et qui peut passer par l'utilisation pratique d'un concept).
Or nous sommes nombreux à faire plus attention à ce qui se passe à l'extérieur (ce qu'on fait, etc., les trucs, le monde), que voir notre état intérieur du moment.
De là découle le monde. Et il prend une certaine couleur.

Pour finir en cet instant, le mot permaculture n'est pas un problème, c'est juste un mot.